« Entre le stimulus et la réponse, il y a un espace. Dans cet espace se trouve notre pouvoir de choisir notre réponse. »
Viktor Frankl

Dans les métiers à haute intensité — sapeurs-pompiers, policiers, soignants, militaires — la performance ne se joue pas uniquement sur les compétences techniques, tactiques et physiques (voir la pyramide de la performance). Elle repose aussi, de manière cruciale, sur notre capacité à nous réguler intérieurement : énergie, émotions, concentration, niveau de tension…

Pour faire simple : dans quel état intérieur je me trouve au moment où je dois agir ?
C’est exactement ce que propose de questionner un outil très accessible : la météo intérieure, issu des Techniques d’Optimisation du Potentiel (TOP)1.


Qu’est-ce que la météo intérieure ?

Imaginez que votre état interne — physique, mental et émotionnel — soit comme une météo.
Parfois, le ciel est clair, vous êtes concentré, calme, disponible : c’est le bon moment pour agir.
D’autres fois, le ciel est couvert ou agité : fatigue, stress, agitation, lassitude, trop ou pas assez d’énergie.

La météo intérieure, c’est cette capacité à faire un état des lieux rapide de soi-même, pour identifier dans quelle « zone » vous vous situez à un instant donné.
Et surtout : pour savoir quoi ajuster avant d’entrer en action.


Pourquoi c’est utile dans les métiers opérationnels ?

Parce que sous stress, nous perdons facilement le lien avec notre état interne.
Pris dans l’urgence ou la routine, on agit par automatisme. Mais parfois, cet automatisme peut nous conduire à :

  • Réagir à côté du contexte (agir trop vite, ou pas du tout),
  • Perdre la lucidité ou la capacité à prendre du recul,
  • Tomber dans l’hyper-contrôle ou, au contraire, dans une forme d’apathie.

Avec la météo intérieure, on peut à tout moment se poser une question simple :

“Est-ce que je suis dans le bon état pour faire ce que je dois faire maintenant ?”


Les trois grandes zones de la météo intérieure

La météo intérieure est souvent présentée sous forme de trois zones. Ces zones ne sont ni bonnes ni mauvaises : elles sont des états passagers, à observer et à ajuster selon la situation.


🟦 Zone d’hypostress : quand l’activation est trop basse

Ce que l’on ressent :

  • Manque d’énergie, fatigue mentale ou physique,
  • Difficulté à se mobiliser, à se concentrer,
  • Sentiment de flottement, d’inertie ou de démotivation.

Ce qui se passe :

  • Le corps et le cerveau sont en mode économie, pas prêts à agir vite ou avec précision.
  • Cela arrive souvent en début de garde, lors de périodes de creux ou après un effort intense sans récupération.

Les risques :

  • Temps de réaction allongé, vigilance réduite,
  • Sous-estimation des dangers ou mauvaise évaluation des priorités,
  • Risque de passer à côté de signaux faibles.

Comment réguler ?

  • Stimuler le corps : mouvements, étirements dynamiques, marche rapide.
  • Activer l’attention : respiration dynamisante (inspiration courte, expiration courte pendant 10 secondes), visualisation stimulante (course avec vision de ligne d’arrivée…), projection mentale de l’action à venir (se voir réussir une activité…).
  • Se reconnecter à l’enjeu ou à l’utilité de la mission (sens de l’action).

🟢 Zone d’activation de l’action : le bon équilibre

Ce que l’on ressent :

  • Énergie disponible, tonus physique et mental.
  • Concentration fluide, calme actif, clarté dans les décisions.
  • Sensation de lucidité et de contrôle sans crispation.

Ce qui se passe :

  • Vous êtes dans la zone idéale de performance : suffisamment activé pour être rapide et concentré, mais sans excès de tension.

Pourquoi c’est précieux :

  • C’est dans cette zone que vous prenez les meilleures décisions, que vous êtes à la fois souple et efficace.
  • Les gestes sont fluides, la coordination est naturelle, les choix sont adaptés.

Comment entretenir cette zone ?

  • Pratiquer régulièrement des techniques de respiration régulatrice (ex. : 4-4, cohérence cardiaque).
  • Utiliser des rituels mentaux avant une intervention (ancrage, visualisation de la réussite).
  • Avoir conscience de son niveau d’énergie tout au long de la garde ou de la mission.

🔴 Zone d’hyperstress : quand l’activation devient excessive

Ce que l’on ressent :

  • Agitation interne, pensées qui s’emballent, difficulté à se poser.
  • Émotions fortes : colère, peur, frustration, anxiété.
  • Corps sous tension : mâchoire crispée, respiration haute, gestes précipités.

Ce qui se passe :

  • Le cerveau passe en mode survie. Le système nerveux sympathique prend le dessus.
  • Le champ attentionnel se rétrécit, la lucidité diminue, la prise de décision devient impulsive ou figée.

Les risques :

  • Réactions inadaptées (agressivité, blocage, confusion),
  • Oublis de procédure, mise en danger de soi ou de l’équipe,
  • Épuisement rapide ou sur-régime émotionnel.

Comment redescendre ?


Le Tableau Emotionnel et Physique, lire l’article complet ici : le TEP.


Une régulation active : ni passive, ni automatique

La météo intérieure n’est pas un état figé, ni un verdict. C’est un outil d’observation active :

  • Si je me sens trop bas ➜ je me stimule,
  • Si je me sens trop haut ➜ je me calme,
  • Si je suis bien ➜ je fais durer.

Et surtout : je m’autorise à faire un check-in interne aussi souvent que nécessaire.


En conclusion : une compétence à intégrer dans le quotidien

Dans nos métiers à fort enjeu, où chaque décision peut avoir des conséquences humaines et opérationnelles majeures, prendre soin de sa météo intérieure, c’est aussi prendre soin de sa mission, de ses collègues, et de soi-même.

Cet outil simple, rapide, personnel, redonne du pouvoir d’action dans un environnement où l’on peut facilement perdre prise.


À essayer dès aujourd’hui :

Avant votre prochaine intervention ou réunion, posez-vous une seule question :

“Quel temps fait-il en moi, là, maintenant ? Et de quoi ai-je besoin pour être pleinement disponible ?”

C’est souvent à partir de là que tout le reste devient plus clair.

  1. https://www.coevolution.fr/nous-connaitre/equipe/edith-perreaut-pierre/ ↩︎

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