Face à des interventions à haute intensité émotionnelle, les sapeurs-pompiers ou autre métier à haute vélocité peuvent entrer en stress intense, altérant leur capacité de décision et bridant leur analyse d’un contexte opérationnel. L’objectif est d’enseigner des outils concrets pour rester efficace sous pression et éviter la perte de contrôle.


AVANT L’INTERVENTION

La phase de préparation est cruciale pour anticiper et gérer le stress. D’où la nécessité de répéter, de « driller ». Voici quelques techniques clés :

  • Anticipation du Stress : Utilisez la visualisation mentale pour imaginer divers scénarios possibles. Les Répétitions Mentales (RM) et la Visualisation Dynamique Opérationnelle (VDO) permettent de se familiariser avec les situations potentielles, réduisant ainsi l’anxiété.
  • Définition d’un Objectif Clair : Fixez-vous un objectif précis, tel que rester lucide en toute situation. Cela vous aidera à maintenir votre concentration et à orienter vos actions.
  • Techniques Respiratoires Préventives : Pratiquez la cohérence cardiaque, l’expiration prolongée et le renforcement positif (R+) pour stabiliser votre état émotionnel et physique avant l’intervention.

PENDANT L’INTERVENTION

📌 La zone d’action optimale (Hypostress – Flow – Hyperstress)

Le point de départ d’une action de préparation mentale s’opère avant tout par un état des lieux de ses états internes, la météo intérieure est un des outils de base pour s’en rendre compte. Cette météo est une évaluation prenant en compte les pensées, émotions et comportements, le fameux triangle de Beck. Ce psychiatre américain père de la TCC (Thérapie cognitivo-comportementale). En effet, notre perception et nos pensées face à une situation influencent notre comportement ainsi que les sentiments que nous ressentons. De même, nos émotions en réponse à une situation déclenchent certains comportements et pensées. S’en rendre compte et les verbaliser permet d’en réduire l’impact et génère une meilleure conscience, connaissance de soi.

Le tableau de la zone d’activation de l’action, bien connu des Techniques d’Optimisation du Potentiel du Dr Edith Perreaut Pierre1, illustre trois états distincts : l’hypostress, caractérisé par une stimulation insuffisante et une baisse de vigilance, nécessitant une dynamisation ; le flow, un état optimal où les compétences et la difficulté sont parfaitement équilibrées ; et l’hyperstress, marqué par une surcharge cognitive et une perte de lucidité, exigeant également une dynamisation pour retrouver l’équilibre.

Comment se jauger ?

Pour se jauger par rapport au tableau de la zone d’activation de l’action, il est essentiel de repérer les signes internes tels que les tensions musculaires, la confusion mentale, l’accélération du rythme cardiaque et les pensées désorganisées. En complément, l’utilisation du triangle de Beck, qui analyse les interactions entre les pensées, les émotions et les comportements, permet de mieux comprendre son état actuel et d’identifier les zones nécessitant une dynamisation ou une régulation pour atteindre l’état optimal de flow.

Posez-vous la question « Est ce que je possède un niveau de stress élevé ? pas du tout ? ou alors je me sens bien ! » Partant de ce constat, vous pourrez mettre en œuvre une des techniques pour vous calmer (si stress élevé), vous dynamiser (si pas de stress, hypovigilant) ou bien vous réguler (si dans un état neutre).


📌 Le Protocole CALME pour gérer le stress en intervention, in situ.

La météo interne réalisée, il est temps de placer mettre en œuvre cette méthode :

C – Comprendre son stresseur

Identifiez ce qui déclenche votre stress. Cela peut être une situation spécifique, une personne, ou un environnement particulier, un contexte interventionnel intense…

A – Accueillir ses émotions

Acceptez vos émotions sans jugement. Reconnaître que le stress est une réaction normale peut aider à réduire son impact comme énoncé avec le triangle de Beck. N’hésitez pas à être le plus précis possible et à mettre votre égo de côté, votre cerveau sait, il n’est pas nécessaire de lui mentir.

L – Libérer la tension

Utilisez des techniques concrètes pour libérer la tension physique et mentale et maintenir un état mental optimal. Cela peut inclure des exercices de respiration, du dialogue interne et renforcement positif.

  • Auto-évaluation Rapide : Demandez-vous régulièrement si vous êtes dans votre zone optimale de performance. Cela permet de réajuster rapidement votre état mental si nécessaire.
  • Respiration Relaxante (R²) : Utilisez des techniques de respiration pour éviter la montée en hyperstress. Cela vous aidera à rester calme et concentré.
  • Dialogue Interne : Concentrez-vous sur l’action et les solutions plutôt que sur la peur. Une analyse fine du contexte vous aidera à prendre des décisions éclairées.

M – Mettre en place des stratégies

Développez des stratégies pour gérer le stress à long terme. Cela peut inclure la planification de techniques en amont ou alors d’en réaliser une évaluation in-situ afin de planifier sa préparation mentale.

E – Évaluer l’efficacité

Vérifiez si les techniques et stratégies utilisées ont eu un impact positif sur votre niveau de stress. Ajustez votre approche en fonction des résultats.


En terme de techniques pour réduire la tension, pourquoi ne pas utiliser l’une des 4 techniques de gestion de l’économie d’air2 du TASSS :

  • Sauter une respiration ou respiration triangle
  • L’intervalle respiratoire ou respiration carrée
  • Le Reilly ou « Ommmmmmmm »
  • Le 2/4 ou respiration relaxante (R²)

Après l’Intervention : Récupération et Analyse

La phase post-intervention est tout aussi importante pour tirer des leçons et se préparer pour les futures interventions, vous pouvez réaliser :

  • Un Défusing Émotionnel et Technique : Prenez le temps de réfléchir à ce qui a bien fonctionné et à ce qui pourrait être amélioré. Cela permet de capitaliser sur les succès et d’identifier les points à ajuster.
  • Des Techniques de Récupération : Utilisez des techniques de relâchement musculaire comme la relaxation progressive de Jacobson (le contracté-relâché), de respiration apaisante ou relaxantes et assurez-vous d’avoir un sommeil réparateur. La récupération physique et mentale est essentielle pour maintenir une performance durable.
  • Une Amélioration Continue : Identifiez des ajustements pour la prochaine intervention. Cette démarche d’amélioration continue vous permettra de progresser constamment. Pourquoi pas utiliser un carnet d’amélioration ?

En intégrant ces outils dans votre routine, vous serez mieux préparé à gérer le stress et à optimiser votre performance mentale avant, pendant et après chaque intervention.


Déroulé de l’Exercice ARI

Un apport théorique est réalisé avec la définition du stress et de son mécanisme, du syndrome général d’adaptation, les émotions puis la méthode CALME, les techniques respiratoires ou de préparation mentale pour s’apaiser ou se dynamiser. Il est également annoncé que le but de cet exercice est de volontairement compliquer la progression et ce afin d’emmener le plus loin possible le porteur ou le binôme dans son état de stress. La non réussite de la mission est un facteur très fortement recherché par l’encadrement.

Afin d’illustrer et de volontairement emmener les manœuvrants face à un état de stress, il a été nécessaire de mettre en situation en place un scénario. Ce scénario nécessitant une prise de décision sous stress (incendie en espace clos, victime inconsciente…) est crée, avec une progression compliquée (cheminement complexe, passage étroits nécessitant de retirer l’ARI, occultation des pièces faciales…) sur ligne guide sous appareil respiratoire isolant sans moyen en eau et en binôme.

La commande est d’évaluer ses états internes (hypostress, flow ou hyperstress) et d’utiliser la méthode C.A.L.M.E pour se gérer. Face à la présence de ces états, le porteur utilisera divers outils pour s’extirper de cette impasse.

A la fin de l’exercice, débriefing classique de ses états émotionnels, des ressentis, de l’analyse des techniques de libération des tensions.


Conclusion et Bénéfices Observés

Le protocole CALME a permis une montée en compétence significative des participants dans la gestion de leur stress et ce dès les premières manœuvres. En intégrant des étapes claires pour comprendre, accueillir, libérer, mettre en place des stratégies et évaluer, les participants ont pu améliorer leur prise de décision en situation complexe. De plus, ils ont gagné en autonomie dans la mise en place d’outils adaptés à leurs besoins spécifiques, renforçant ainsi leur capacité à faire face aux défis quotidiens en plus des défis professionnels de manière plus sereine et efficace.

Sources :

  1. « Comprendre et pratiquer les TOP » Dr. Edith Perreaut Pierre ↩︎
  2. « Techniques d’Auto-Sauvetage et Sauvetage de Sauveteur » ↩︎

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